Voici une des endémiques les plus remarquables, le « bicacaro », l’emblème de la protection des plantes canariennes, Canarina canariensis ! Elle a souvent le comportement d’une liane, famille des Campanulacées, comme les campanules bleues de chez nous…
Résumé : L’archipel des Canaries est constitué de 7 îles toutes d’origine volcanique… l’île de Lanzarote… Tenerife… Ici encore, l’évolution a fait preuve d’originalité, avec un taux d’endémicité qui approche 40%, sans doute moins importante qu’aux Galapagos, mais montrant une biodiversité bien supérieure dont nous verrons quelques aspects et exemples.
Ces îles sont habitées depuis près de 3000 ans avant JC par un peuplement probablement berbère, les Guanches, mais les avis sur leur origine sont encore partagés. Connues depuis les Grecs, les îles sont progressivement conquises à partir des années 1400 par le normand De Bethancourt pour le compte de la couronne d’Espagne puis par les espagnols. On doit à cette première colonisation « normande » un grand nombre de patronymes français toujours très courants ! Par la suite et grâce aux bienfaits apportés durant ce 15ème siècle par la civilisation européenne, les Guanches seront en grande partie exterminés ou réduits en esclavage, et leur civilisation comme leur histoire entreront dans l’oubli.
L’île de Lanzarote, proche des côtes africaines, est remarquablement aride. Avec Fuerteventura, c’est la plus anciennes de l’archipel, et son âge est estimé à 19 millions d’années. Située sur une faille transformante, elle porte 300 cratères et un tiers de sa surface a été recouvert par la gigantesque éruption des années 1730-36. Les paysages sont à couper le souffle : des centaines de volcans de tous âges, des coulées basaltiques de tous les modèles possibles (en particulier les fameux canaux de lave très abondants), une végétation rabougrie qui ne masque rien de la géologie , des villages aux petites maisons blanches dans un univers minéral noir…
Malgré tout, avec ténacité, les hommes y ont entrepris une agriculture surprenante : les plantations se font directement dans les scories basaltiques ! Dans certains cas, des entonnoirs sont creusés dans ce matériau inhospitalier pour y cultiver la vigne (donnant le « malvoisie », un vin très original), mais également des figuiers, manguiers…
Les 5 autres îles sont verdoyantes, souvent plus accidentées et plus élevées, et nettement plus jeunes (3 millions d’années pour El Hiero, la plus récente).
C’est à Tenerife que nous rendrons visite.
C’est la plus grande île, dominée par le Teide (3718 mètres, le point le plus haut d’Espagne !), un stratovolcan issu d’un « point chaud », avec à son pied l’immense caldeira de las Canadas. L’activité volcanique est en quasi sommeil, mais des fumeroles s’en échappent encore. Les coulées basaltiques mais également hyper-acides (rhyolites,
obsidiennes et pierres ponces) dépassent l’imagination, et sont peuplées -chichement- d’espèces endémiques. La Cordillère dorsale arrête les nuages et la pluviométrie est élevée.
La végétation est luxuriante sur la façade soumise aux alizés. Les anciennes forêts de lauriers, les laurisylves, sont spectaculaires, en particulier au nord dans la péninsule de Anaga.
Une immense forêt de pin des Canaries (Pinus canariensis) couvre les hauteurs de l’île. Au sud et à l’est, le climat est au contraire plus sec, voir sub-aride, et aux altitudes du Teide il est de type alpin. Le tourisme est agressif, avec un mitage du paysage du moins aux basses altitudes. L’agriculture est bien plus classique qu’à Lanzarote, et il faut noter des bananeraies très étendues à l’ouest (Vallée de la Orotava) et au sud.
Conférence par Jean-Yves Cretin, naturaliste, retraité de l’Université, assistant au Laboratoire de Biologie de l’Environnement.