Ce lézard, (Lacerta vivipara) est bien présent dans le Jura à des altitudes supérieures à 800 m et jusqu’aux plus hauts sommets.
Les biotopes occupés sont variés : lisières forestières, murets et « murgers » prairies humides et tourbières. Il recherche des postes d’insolation pour élever sa température corporelle et reprendre son activité après le froid nocturne.
Dans les tourbières il occupe des sites qui, en hiver, subissent des périodes de froid intense , les températures négatives de l’ordre de -~20~°C sont fréquentes, avec ou sans couverture neigeuse.
Ce lézard est dépourvu de régulation thermique, donc il subit des températures qui devraient entraîner sa mort par congélation. Pour survivre pendant la période d’hibernation, il se réfugie dans une cache ou un terrier appelé « hibernaculum » à l’abri de l’humidité. La température mesurée à l’aide d’une sonde thermique y atteint malgré tout -~10~°C sous la neige…
Dans cet enclos où les lézards hibernants sont repérés et accessibles, on procède à une prise de sang au niveau du sinus orbital. Le prélèvement est de 2 à 5 microlitres aspirés dans un tube capillaire hépariné (pour éviter la coagulation) et ceci sans dommages.
Puis au laboratoire on soumet les échantillons à une analyse thermique. L’appareil utilisé est un calorimètre différentiel à balayage (DSC 30 Mettler) qui permet de passer de la température ambiante à des valeurs fortement négatives, jusqu’à la prise en glace du sang. Cette cristallisation est mise en évidence par un pic exothermique, sur l’enregistrement de la courbe d’analyse thermique.
Les valeurs enregistrées sont proches de -~22~°C, de novembre à janvier. En revanche, en mai-juin, la même analyse donne des températures de cristallisation de –~8~°C.
Les composants du sang sont à l’origine de ces valeurs : l’analyse biochimique montre que le glycérol et le glucose sont les agents cryoprotecteurs.
Le phénomène de surfusion du sang intervient également pour éviter la prise en glace totale de l’animal et donc sa mort au cours d’une période de froid intense.
Il existe donc une adaptation aux contraintes écologiques chez cette espèce qui se traduit par la modification des paramètres physiques du sang et du métabolisme.
Le glucose dont la concentration est multipliée par trois en hiver a pour rôle à la fois la protection contre le gel et l’entretien d’un métabolisme basal de survie.
Au printemps, dès les températures favorables et la sortie de l’hibernation, la reproduction a lieu puis la femelle donne naissance à des jeunes déjà formés et aptes à se déplacer et à se nourrir. On lui a donc donné le nom de vivipare, mais dans la réalité l’éclosion des œufs a lieu au moment de l’expulsion des jeunes. En fait le Lézard vivipare est comme tous les Lézards et Reptiles : un ovipare. Il améliore le succès de sa reproduction en évitant le dépôt des œufs dans des milieux hostiles, soumis à des risques de températures létales.
Dans le Sud de la France, au climat plus favorable , les femelles de Lézard vivipare pondent des œufs comme le Lézard des murailles et le Lézard agile.
En résumé : dans le Jura, le Lézard vivipare montre une grande capacité d’adaptation aux milieux montagnards et aux conditions climatiques rigoureuses.
Références bibliographiques :
Metabolic adaptations of European common lizard (Lacerta vivipara). Voituron Y., Hérold J.-P., Grenot C. 1998 in Actes du Congrès Européen d’Herpétologie. Chambery.
Les poissons, amphibiens et reptiles de la montagne jurassienne. Craney E., Pinston H., Vergon J.-P., Hérold J.-P. Ed Néo-Typo juillet 2005. 183p.