Par Jean-Pierre Hérold, janvier 2024
Une galerie de portraits de personnages régionaux bien connus de tous les naturalistes ayant fréquenté les rivières du Jura géographique et aussi des pêcheurs qui sont maîtres dans leur art de leurrer les poissons emblématiques vivant dans leurs eaux : la truite fario avec ses trois bandes foncées et l’ombre commun avec son vexille ou étendard.
Et tous les amoureux des eaux vives, naturalistes, artistes, écrivains voire sportifs ou aussi hydrogéologues, ornithologues, herpétologues, et bien d’autres. De la Vouivre à Némorin des loutres et à Severin Ménigoz pour ceux qui connaissent.
Cette présentation rappelle quelques figures connues :
L’auteur-pêcheur Jean Paul Pequegnot qui a écrit un ouvrage de référence intitulé : la LOUE, ouvrage fort recherché en bouquinerie. Ce document montre ce qu’une rivière en bon état dans les années 1970, pouvait apporter comme ressources de poissons pour la gastronomie et comme plaisir de la pêche pour le sport. Il est aussi l’auteur d’un « répertoire des mouches artificielles françaises » véritable référence face à la littérature de langue anglaise.
Pierre Choulet qui a géré le Moulin du Plain à Goumois sur le Doubs franco-suisse, et qui a reçu la fine fleur internationale des « chapeaux à plumes », des pêcheurs fortunés accueillis avec une convivialité extrême. Avec la même gentillesse il donnait ses conseils aux débutants. A sa table se rencontrait tout un monde d’amoureux des rivières.
Bien plus tôt, le frère Ogérien auteur du premier ouvrage en 1863 du recensement des espèces piscicoles dans « Histoire naturelle du Jura, zoologie vivante » ou comment être moine et naturaliste en même temps.
En 1910, Charles Beauquier , député du Doubs, le premier à avoir demandé et obtenu la mise en réserve d’un site remarquable, la source du Lison. Un site protégé visité par de nombreux touristes amoureux des eaux vives. Aujourd’hui encore, il garde tout son attrait avec le Creux Billard et son système karstique complexe faisant partie d’un modèle de résurgence.
Sans oublier Gustave Courbet, ses toiles célèbres et son musée à Ornans ; toute une iconographie des sources et des rivières de sa terre natale. La culture artistique régionaliste est encore bien vivante, reconnue et prisée des collectionneurs.
Et aussi des scientifiques :
Le pionnier hydrogéologue et spéléologue, le professeur Fournier, a été le premier à avoir exploré les sources et les grottes de toute la région. Ses élèves furent nombreux et apportèrent des précisions à la connaissance des réseaux par des colorations réalisées depuis les sources et les dolines vers les résurgences. La cartographie de l’inventaire des circulations souterraines a été complétée dès 1987 par Pierre Chauve et ses collaborateurs du Laboratoire de Géologie de Besançon, puis par Pascal Reilé et Jacques Mudry, spécialistes du karst.
L’hydrobiologiste Jean Verneaux auteur d’une thèse en 1973 sur la biotypologie des rivières, dont le Doubs, de sa source à Mouthe, à sa confluence avec la Saône à Verdun sur le Doubs. Il a montré la répartition longitudinale des espèces aquatiques et classé les secteurs selon les contraintes de l’environnement : de la zone à truite et à ombre jusqu’à celles à brème et à carpe avec une nomenclature basée sur l’IBGN, indice biologique global normalisé.
Plus récemment les enseignants chercheurs du Laboratoire de Chrono- environnement de l’Université de Bourgogne-Franche-Comté.
F Degiorgi et PM Badot ont présenté un rapport exhaustif de l’évolution de la qualité des eaux et des milieux aquatiques mettant en évidence les responsabilités des communautés humaines agricoles, industrielles et urbaines. Ce travail important est à présent une référence dans les données scientifiques.
Le Muséum de la Citadelle de Besançon montre des aquariums d’espèces régionales, dont l’apron, poisson inscrit en liste rouge, menacé de disparition, que Mickael Béjean a réussi à reproduire en conditions maîtrisées.
Il faut aussi citer les bureaux d’études, spécialisés dans les rivières karstiques et les eaux continentales ; ils maîtrisent les paramètres de l’évolution des cours d’eau de la Région soumis à des agressions multiples, dont la dérive climatique. Ils proposent les aménagements nécessaires pour assurer un assainissement efficace des élevages et des ateliers liés à la fabrication du fromage de Comté qui produit plus de 70 000 tonnes par an de ce produit emblématique, avec, malheureusement, des rejets polluants pas toujours maîtrisés.
L’objectif reste la reconquête de la qualité de l’eau des rivières de l’espace jurassien grâce à l’intervention de la Région et des départements avec des structures comme l’EPAGE, les Syndicats mixtes, avec des plans de gestion de rivières, et le soutien de l’Agence de l’eau RMC : pour des résultats attendus en 2027, voir 2035…
NB : Voir aussi les références bibliographiques naturalistes proposées par Marc Nicolet dans le bulletin de la SHND 2021-2022 tome 99 p 25-31.