La petite Lamproie, une première reproduction en milieu contrôlé au Muséum de la Citadelle de Besançon

Par Jean-Pierre Hérold d’après le travail de Michaël Béjean, responsable de l’aquarium de la citadelle de Besançon et avec les photo et film de Martin VRANKEN *

femelle fixée à un gros galet pendant la reproduction

Habitant méconnu des têtes de bassin des  rivières de Franche-Comté

Son nom latin est Lampetra planeri (Bloch 1786) ou Lamproie de Planer, qualifiée de « chatouille » ou « sucet ». Elle appartient à la famille des Pétromyzonidés et à la classe des Agnathes, animaux primitifs sans mâchoires, ce n’est donc pas un poisson, ce n’est pas plus un serpent !

Son corps d’environ 20 cm de long, est serpentiforme, de couleur brun-jaune. Les nageoires peu développées, donc peu visibles, lui donnent l’allure d’une petite couleuvre, d’autant plus que ses mouvements d’ondulation dans l’eau sont du même type. La bouche est entourée d’un disque en forme de ventouse, muni de dents labiales cornées. En arrière, les orifices respiratoires ou spiracles, au nombre de sept de chaque côté, correspondent avec une chambre branchiale où se font les échanges respiratoires. L’eau ne passe donc pas par la bouche. Autres détails anatomiques étonnants, le cœur n’a qu’un ventricule et une oreillette et le tube digestif n’a pas d’estomac.

La Lamproie de Planer vit uniquement dans des eaux pures et fraîches, sur fond sableux, et recherche les zones calmes où s’accumulent les débris organiques et la vase.

Les adultes ne se nourrissent pas, autre particularité étonnante ! Mais la vie d’adulte ne dure que le temps de la reproduction, de mars à juin, puis ils dépérissent et meurent. En revanche la vie larvaire dure de 3 à 5 ans, (on appelle cette larve « ammocète »). Elle vit enfouie dans le sable et la vase des bordures de la rivière, s’alimentant de petites proies comme les micro-invertébrés. Le passage de l’état larvaire à l’adulte est une métamorphose au cours de laquelle le tube digestif régresse, les yeux apparaissent, et surtout les organes reproducteurs se développent. La ponte a lieu, dans le sable où les géniteurs élaborent une sorte de nid qui reçoit les œufs pondus.

La biologie de cette lamproie est donc très spécifique et en fait une espèce indicatrice de rivières de qualité.

Elle est devenue rare dans le bassin versant du Rhône, ainsi elle n’est plus signalée que dans les réseaux amonts et les têtes de bassin des rivières karstiques pures et dans quelques rivières sous-vosgiennes.

Toutes les pollutions qui entraînent le développement des algues filamenteuses et le colmatage des fonds, provoquent la disparition de l’espèce. Les étiages et les canicules qui affectent les cours d’eau réduisent ses zones d’habitats.

L’espèce bénéficie de mesures de protection prises dans le cadre de la Convention de Berne et des directives européennes en 1992. La protection des habitats de la Lamproie est inscrite dans les mesures Natura 2000.

Les conditions de  reproduction de cette espèce sont mal connues,  c’est pourquoi le Museum de la Citadelle de Besançon et sa partie dédiée aux milieux aquatiques régionaux  conduite par Michaël Béjean s’est focalisée sur cette petite Lamproie après avoir réussi la reproduction de l’apron , autre espèce endémique en danger .

Quatre mois après la ponte des Lamproies adultes, des larves sont en élevage dans les aquarium du Muséum. Les conditions d’élevage sont testées avec différents substrats et différentes eaux de paramètres stabilisés (pH, température, oxygénation, concentration en ions… )   

Les larves atteignent 30mm pour les plus développées et 15 mm pour d’autres. L’observation à la loupe binoculaire montre l’anatomie des Agnathes : disque buccal, spiracles et tube digestif contenant des éléments granuleux colorés en jaune. 

La croissance est lente par rapport à des poissons téléostéens tels que truites ou ombres qui occupent les mêmes niveaux trophiques dulcicoles.

Cette première tentative de reproduction en milieu contrôlé est une réussite, elle suit son cours et apporte déjà des informations scientifiques remarquables.  

  • Martin VRANKEN qui publie sur le site DORIS  a aimablement donné son accord pour que la SHND utilise son travail  
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