Suite et appel à recherches
par Jean Pierre Hérold
Sa présence dans les eaux des cours d’eau têtes de bassin en Franche Comté est prouvée par des observations publiées dans plusieurs revues scientifiques, mais la situation évolue vers une régression des populations depuis deux décennies. Les secteurs qui hébergent encore cette espèce deviennent rares donc nous faisons appel aux naturalistes, pêcheurs et à tous ceux qui fréquenteront les rivières comtoises en 2022 pour contribuer à une mise à jour de cette cartographie.
Ouvrez l’œil et retournez là ou vous avez souvenir d’avoir vu des lamproies !
Cherchez des nids dans les graviers ou des individus morts après la reproduction ce qui est la règle suite à la ponte de plusieurs milliers d’œufs. Cette ponte a lieu entre mars et mai selon la température de l’eau, soit entre 8° et 11°.
Pour vous guider vers les bons spots voici les résultats de présences signalées par des naturalistes ou des pêcheurs pour les années 1990 à 2020.
DANS LE DEPARTEMENT DU DOUBS
LA LOUE : à Cléron en 2007 et à Vuillafans en 2017 et 2019
LE LISON : amont en 2010 : à Nans sous Sainte Anne
LE DESSOUBRE : en 2020 à Vauclusotte et Moulin du bas
LE CUSANCIN : Pont les Moulins (pas de dates)
LE DOUBS : amont de Goumois, pêche électrique 2020 : 9 lamproies soit 0,08 Kg
DANS LE DEPARTEMENT DE HAUTE SAONE
L’OGNON : les Aynans en 1990, puis Belonchamp en 2013
LA REIGNE : avant les pollutions graves !
LE DURGEON : il y a plus de 10 ans !
L’OUGEOTTE : secteur de Jussey (pas de dates)
LA LANTERNE : amont de Lantenot (pas de dates)
LE BEULETIN : Esmoulières en 2019
LE CONEY : secteur de Corre en 2010
NB : d’autres rivières sous-vosgiennes ont hébergé la petite lamproie, mais les sécheresses et les étiages de 2003, puis 2018, 2019 et 2020 ont été préjudiciables pour l’espèce. On ignore la situation actuelle.
DANS LE DEPARTEMENT DU JURA
LA CLAUGE : la Loye en 2019 en forêt de Chaux
LES DOULONNES : Plumont 2019
L’AIN : en 2018 à Marigny et Doucier
LA SEILLE : amont en 2000 mais pas d’observations après !
LA CUISANCE : présence ancienne en amont, avant 2000
LA VALOUSE : une information ancienne avant 2000
NOTEZ LES LIEUX, LES DATES et faites passer l’info à jpmhd@noos.fr
C’est important pour préciser l’état et l’évolution des populations et donc des rivières ! C’est une espèce indicatrice de la qualité des milieux et de l’eau.
UN RAPPEL :
Son nom latin est Lampetra planeri (Bloch 1786), ou Lamproie de Planer, qualifiée de « chatouille » ou « sucet ». Elle appartient à la famille des Pétromyzonidés et à la classe des Agnathes, animaux primitifs sans mâchoires.
Son corps d’environ 20 cm de long, est serpentiforme, de couleur brun-jaune. Les nageoires peu développées, donc peu visibles, lui donnent l’allure d’une petite couleuvre, d’autant plus que ses mouvements d’ondulation dans l’eau sont du même type. La bouche est entourée d’un disque en forme de ventouse, muni de dents labiales cornées. En arrière, les orifices respiratoires ou spiracles, au nombre de sept de chaque côté, correspondent avec une chambre branchiale où se font les échanges respiratoires. L’eau ne passe donc pas par la bouche. Autres détails anatomiques étonnants, le coeur n’a qu’un ventricule et une oreillette et le tube digestif n’a pas d’estomac.
La Lamproie de Planer vit uniquement dans des eaux pures et fraîches, sur fond sableux, et recherche les zones calmes où s’accumulent les débris organiques et la vase.
Les adultes ne se nourrissent pas, autre particularité étonnante !
Mais la vie d’adulte ne dure que le temps de la reproduction, de mars à juin, ils se regroupent pour former des nids de graviers de 20 à 30 cm de diamètre et de 10 cm de profondeur ou les accouplements sont frénétiques ; puis ils dépérissent et meurent tous ensemble ; c’est à cette période que la recherche est la plus favorable puisque les individus morts sont bien repérable au fond des rivières, dans les zones de calme ou de remous.
En revanche la vie larvaire dure de 3 à 5 ans, (on appelle cette larve « ammocète »). Elle vit enfouie dans le sable et la vase des bordures de la rivière, s’alimentant de petites proies comme les micro-invertébrés. Le passage de l’état larvaire à l’adulte est une métamorphose au cours de laquelle le tube digestif régresse, les yeux apparaissent, et surtout les organes reproducteurs se développent.
La biologie de cette lamproie est donc très spécifique et en fait une espèce indicatrice de rivières non polluées et non perturbées dans leur cours, donc en bon état hydrobiologique et hydrologique.
Elle est devenue rare dans le bassin versant du Rhône, ainsi elle n’est plus signalée que dans les réseaux les plus en amont et donc les têtes de bassin des rivières karstiques en bon état et dans quelques rivières sous-vosgiennes.
Toutes les pollutions qui entraînent le développement des algues filamenteuses et le colmatage des fonds, provoquent la disparition de l’espèce. Les étiages et les canicules qui affectent les cours d’eau réduisent ses zones d’habitats comme les travaux « d’aménagements » ou de « gestion de crues ».
L’espèce bénéficie de mesures de protection prises dans le cadre de la Convention de Berne et des directives européennes en 1992.
La protection des habitats de la Lamproie est inscrite dans les mesures Natura 2000.
L’espèce est classée « vulnérable « sur la liste rouge des Poissons de Franche Comté depuis 2014.
Pour information : la lamproie marine (Petromyson marinus) fait partie de la même famille mais elle atteint un mètre de long. Elle vit en mer et remonte les fleuves pour frayer. En Bourgogne Franche Comté l’axe Loire-Allier est encore le passage de quelques migrations anadromes jusqu’à l’Arroux ou on observe des preuves de reproduction.
Références :
Les poissons d’eau douce de France, ed. Biotope Editions, 2011. publication scientifique du Museum ( Paris ). Collection Inventaire et biodiversité. Auteurs : P.Keith, H.Persat, E. Feunteun, J.Allardi.