Quand l’histoire géologique dessine le vivant : la saga de la flore de Nouvelle-Calédonie

Conférence SHND par Arnaud Mouly
Mardi 21 février 2023, 20 h 30 à l’amphi A, bâtiment de métrologie de l’UFR Sciences & Techniques de la Bouloie, route de Gray à Besançon

ENTRÉE LIBRE ET GRATUITE

Arnaud Mouly est enseignant et chercheur au laboratoire Chrono-environnement, directeur du jardin botanique de l’université de Franche-Comté et de la Ville de Besançon.

Les terres émergées de Nouvelle-Calédonie sont un assemblage complexe d’unités ophiolitiques allochtones et d’empilements de sédiments volcano-clastiques. Le trait structural le plus marquant de l’île consiste en la présence d’une nappe de péridotites arrachée au manteau océanique à l’Eocène supérieur. Communément appelés « massifs miniers », ces massifs recouvrent 8 000 km² sur les 18 000 km² que compte la Grande-Terre, soit un tiers de sa superficie. Les péridotites sont des roches dites ultrabasiques, déficitaires en silice, aluminium et autres éléments minéraux, mais très riches en métaux dont principalement le magnésium, le fer, le manganèse, ce qui les rend relativement hostiles pour l’installation du vivant.

Maquis minier sur latérite – Massif de Tia –
photo Arnaud MOULY

On dénombre aujourd’hui près de 3 261 espèces de végétaux vasculaires dont 76 % d’espèces endémiques, ce qui la classe au troisième rang mondial de l’endémisme après Hawaï avec 89 % et la Nouvelle-Zélande avec 82 %. Lorsqu’on s’intéresse aux formations sur substrats ultramafiques, malgré les contraintes biotiques qu’ils imposent, le taux d’endémisme de la flore grimpe à presque 100%. Par ailleurs, diverses études indiquent clairement que la notion d’endémisme minore la réalité de la structure floristique tant le micro-endémisme sur massifs miniers est notable. Malgré quelques lignées gondwaniennes relictuelles comme les Amborella et les Araucaria, une majeure partie de cette flore semble avoir été renouvelée après la dernière obduction de l’archipel il y a 34 Ma. Comprendre l’origine et les processus de diversification et d’adaptation de la flore néocalédonienne sur les différents types de substrats est un enjeu pour la recherche en écologie ainsi qu’en systématique et évolution, notamment pour le cas des sols pauvres en éléments nutritifs et riches en éléments métalliques. La mesure du micro-endémisme et de la spécificité des habitats met en exergue les enjeux majeurs de conservation face à l’anthropisation, incluant régimes de feux, expansion agricole, exploitation minière et évidemment face à l’incurie de la politique de conservation se pliant aux enjeux économiques.

Grevillea nepwiensis (Proteacées) – Micro-endémique des massifs miniers de la région de Pouembout
Photo Arnaud Mouly

Cette conférence explorera la diversité et l’extravagance de la flore et des habitats de Nouvelle-Calédonie et présentera une sélection des avancées scientifiques dans la compréhension de la diversification et de l’adaptation des espèces aux substrats ultramafiques notamment, ainsi que les enjeux de conservation et de recherche à venir pour ce point chaud de la biodiversité mondiale.

Ce contenu a été publié dans Évènements, SHND. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.